« Nous sommes en position de combat politique, médiatique et mystique » « Goukouni Weddeye, hier, marionnette entre les mains de Kadhafi, aujourd’hui, Idiot Utile de la Françafrique »

 

Le procès de Hissein Habré s’ouvre le 20 juillet prochain à Dakar. A presque une semaine de cette date, Mme Fatimé Raymonne Habré rompt le silence. En exclusivité pour « le Populaire », l’épouse de l’ancien homme fort de Ndjamena dit ses vérités par rapport au procès. Entretien.

 

Mme, nous sommes, à deux semaines du procès, quel est votre état d’esprit ?

 

Nous sommes en position de combat, face à une grande coalition médiatique et politique financée par les pays occidentaux et Idriss Deby. C’est un combat que nous menons sur tous les fronts, médiatique, politique et mystique. En ce mois Saint, nous sollicitons à travers nos prières et notre jeûne, que le Tout Puissant protège le Président Habré qui est toujours sans soins depuis sa crise cardiaque, la situation n’a pas changé d’un iota malgré tout ce qu’on a eu à dire. C’est inquiétant ! Mais nous irons puiser au plus profond de ceux que nous sommes pour faire face à l’arbitraire et à tous les abus que nous subissons. Allah Kareem !

 

Ce procès Habré est –il un tournant pour l’Afrique ? 

 

Le procès Habré va édifier la jeunesse africaine sur plusieurs points importants : Tout d’abord, les pays occidentaux qui nous pillent quotidiennement, ont tous la même position, le même discours sur toutes les questions concernant l’Afrique, leurs dirigeants, leurs médias, leurs hommes politiques, leur jeunesse. Pourquoi ? Parce qu’ils défendent un système mis en place et qui leur permet de vivre sur notre dos. Et ce système, il faut le perpétuer, le sécuriser d’où la participation de leurs médias pour présenter une image négative de notre continent. Donc, cette image de l’Afrique, terre de toutes sortes de crimes, le Sénégal est utilisé pour diffuser et accréditer cette fausse image de l’Afrique par le procès Habré. Que nous apprend l’histoire, si vous prenez la France, les États Unis et les Pays Bas, ce sont des terres d’esclavage, des pays qui ont bâti leur empire sur le sang, les génocides et les destructions des peuples d’Afrique et d’ailleurs. Sont-ils bien placés pour juger les Africains ? Et en face d’eux, vous avez des pays africains qui sont incapables de mener un seul combat d’envergure ensemble, solidaires et unis et cela va de mal en pis. Ensuite, l’affaire Habré ne peut se traiter sans l’histoire du Tchad, faite de nombreuses interventions militaires françaises (7 au total) interventions libyennes, de nombreux chefs de guerre. Aussi quand le Sénégal les exclut de l’affaire malgré qu’ils soient dans le champ de compétences, il ne fait pas œuvre de Justice, bien au contraire, l’Etat du Sénégal a pris fait et cause pour une partie du Tchad contre une autre, son action dans l’affaire Habré est une entreprise de divisions, de réouverture de blessures entre Tchadiens. Croyez moi, si HH a pu vaincre Kadhafi et son armée, c’est parce qu’il avait la majorité du peuple tchadien à ses côtés. Alors, c’est cette majorité que le Sénégal et les juges des CAE ont ignoré dans leurs douleurs et par rapport à tous les crimes dont ils ont fait l’objet. C’est un vrai désastre, et l’avenir nous le démontrera. 

Mais l’Afrique a besoin de lutter contre l’impunité ?

 

Vous avez dit l’Afrique ? Elle est où dans l’affaire Habré ? Il y a quelques jours, Jacqueline Moudeina, une des avocates du Tchad a dit lors de leur point de presse : « Nous remercions Macky SALL, c’est vraiment grâce à lui que nous sommes arrivés à ce procès" Donc vous voyez, il n’y a pas d’Afrique dans cette affaire. Autre leçon importante pour la jeunesse africaine justement par rapport à la question que vous posez sur l’impunité. Le procès Habré pose la question de la capacité et du courage de nos dirigeants d’apporter leurs solutions à toutes les questions qui se posent à nos pays. Prenez la question de l’impunité que vous posez. En Afrique du Sud, tous les pays occidentaux ont vanté les mérites du système de la Commission Vérité – Réconciliation. Très bien, alors question : ce système pourquoi ne l’a t-on pas appliqué aux autres cas en Afrique ? Pourquoi ? Parce que tout simplement en Afrique du Sud, tous les appareils de répression du régime de l’apartheid étaient majoritairement composés de blancs. Et par conséquent, les pays occidentaux, qui ne l’oublions pas, ont soutenu, aidé et renforcé le régime de l’apartheid, en lui donnant même l’arme nucléaire, ces pays ne voulaient pas voir des milliers de blancs en prison. Tout simplement et c’est pourquoi cette solution de Commission Vérité Réconciliation a été une parenthèse vite refermée.

 

En outre, la question de l’impunité en Afrique, elle se pose aussi aux interventions militaires françaises contre des africains pour simplement aider des dictatures et sauvegarder leurs intérêts. Il y a eu des massacres de tchadiens lors de ces interventions étrangères. Les pays occidentaux ne vont jamais poser ce débat. Mais si, la question est traitée par les Africains eux-mêmes, ces crimes seront dénoncés. Les juges des CAE en mission commandée, ont mis la tête dans le sable face à cette question qui relevait pourtant de leur compétence.

 

Récemment, il y a eu en RCA, au Burkina il y a à peine un mois, des cas de viols et de maltraitance sur des enfants mineurs commis par des troupes étrangères : ce sont des crimes de guerre. Qu’est ce qu’on a fait ? On les a exfiltrés et protégés, exactement comme pour les voyous de l’Arche de Zoé au Tchad. Les dirigeants africains sont totalement incapables de protéger leurs citoyens face à tous ces abus. Vous constatez que l’impunité leur est garantie en Afrique. Alors le bla bla bla sur la lutte contre l’impunité…

 

L’ancien Président Goukouni Weddeye a fait une sortie dans JA par rapport au procès, qu’est-ce que vous pensez de ses propos ? 

 

Je constate qu’il a quitté sa chaise protocolaire d’ancien président transformé en potiche par Idriss DEBY, pour meubler les cérémonies et visites de Chefs d’Etat, le temps d’une interview sur le site de Jeune Afrique, et espérer exister à travers l’affaire Habré. Alors qu’ils étaient rebelles en lutte armée contre le régime de Tombalbaye soutenu par l’armée française, Goukouni Weddeye voulait accepter l’aide de la Libye de Kadhafi, Hissein Habré la refusa, dénonçant les visées expansionnistes de Kadhafi. Ce fut la séparation, Habré partit vers l’Est avec ses hommes, et Goukouni Weddeye tomba dans les bras de la Libye. Goukouni Weddeye est le Pétain du Tchad, il a été une marionnette entre les mains de Kadhafi, il a cautionné et causé la mort de milliers de jeunes tchadiens tués par les forces libyennes et ses hommes. Il a aussi cautionné le pillage du Tchad par la Libye. Il est le symbole de ces hommes qui ont encaissé les pétrodollars libyens pour détruire et vendre leur pays. Son parcours politique est une véritable tragédie. Il est responsable de la grande guerre de 9 mois qui a opposé les 10 chefs de guerre, agents de la Libye à Hissein Habré. Un commando des hommes de Goukouni est allé assassiner sur leur lit d’hôpital des blessés faisant partie des hommes de Hissein Habré. Informé de ces crimes lâches, Hissein Habré lui a téléphoné, il a répondu qu’il n’était pas au courant de cette attaque. Et les hommes de Hissein Habré, à peine, étaient-ils en train d’enterrer leurs morts que d’autres attaques de la part des hommes de Goukouni eurent lieu. Et ce fut la guerre. Aux termes de celle-ci, en 1981, il fut porté par les chars libyens au pouvoir. Dés le lendemain de son accession au pouvoir, il a autorisé et décrété 3 jours de pillage des biens des personnes et des édifices publics dans la capitale Ndjamena, en guise de cadeau, de butin de guerre pour ses hommes et de représailles contre les populations qui soutenaient Hissein Habré. Et la ville fut ravagée par ses hommes. Un mois après, il a signé avec Kadhafi un accord de fusion du Tchad et de la Libye. Voilà un homme qui voulait faire disparaître son pays et le transformer en une province libyenne. Peut-il se comparer à Hissein Habré ?

 

Donc, vous n’avez pas été surprise par les propos tenus par Goukouni Weddeye dans son entretien avec Jeune Afrique 

 

Goukouni Weddeye est en politique, l’Idiot Utile. Quand Jeune Afrique, qui est un des premiers acteurs du lynchage médiatique contre le Président Habré, compte tenu de ses liens avec la françafrique mais aussi avec Feu Kadhafi à l’époque de l’agression et de l’occupation du Tchad, donc quand JA vous tend le micro, ce n’est pas pour vous permettre de dire du bien de Hissein Habré. Ensuite, par rapport au procès, il faut souligner que Goukouni a menti dans cette interview. D’abord, les juges des CAE en mission le 25 avril 2014 au Tchad l’ont convoqué, il a refusé, puis de nouveau, de Dakar, on l’a convoqué le 12 juin 2014 pour venir à Dakar le 9 juillet 2014, il a encore refusé, enfin, c’est par une commission rogatoire du 15 juillet 2014 que les juges des CAE ont envoyé une série de questions pour que le Procureur de la République au Tchad les lui pose, mais il a encore refusé. Ces questions concernaient les différents combats qui ont opposé la coalition pro-libyenne aux FAN de Habré, l’appui logistique, humain, militaire et financier de la Libye à ses troupes, sur le rôle de l’Etat major libyen à ses côtés et la suite logique, la question des crimes perpétrés par ses hommes et les troupes libyennes etc. Le Procureur du Tchad a écrit aux CAE en les informant que M Goukouni Weddeye a déclaré "ne pas souhaiter intervenir dans ce dossier." Voilà donc un homme qui a du mal à se regarder dans le miroir, face à son passé et parler de son action qui se résumait à être un pantin au service de l’Etranger contre son peuple. Je voudrai aussi souligner que l’un des 10 chefs de guerre, M Acheikh Ibn Oumar qui a fait la guerre aux côtés de Goukouni et de la Libye contre Hissein Habré, a reconnu officiellement lors d’une émission de radio, l’exécution de plus d’une centaine de prisonniers faisant partie des hommes de Hissein Habré par eux. S’il y avait une véritable justice, on se demande comment tout ce monde aurait pu y échapper. Aujourd’hui, 25 ans après, Goukouni est toujours dans la posture de la marionnette et de l’Idiot utile de la Françafrique. Idriss DEBY lui a fait croire qu’il allait mettre à sa disposition 30 milliards pour des projets au Nord du Tchad, il est rentré d’Algérie, depuis 7ans, il n’a pas vu l’ombre d’un kopeck. Il patiente toujours et, est utilisé par Deby pour meubler les cérémonies officielles, utilisé par Deby aussi, en Libye pour apporter de l’argent à une partie de la communauté Toubou pour créer des problèmes aux autorités politiques libyennes. Utilisé par RFI qui a signé un contrat en or avec les CAE pour diffuser ses inepties lors du procès. Utilisé encore par Jeune Afrique, dans sa guerre contre Hissein Habré, puisque vous avez constaté comme moi que l’interview de M Goukouni a été relayé ici au Sénégal par des journaux, cela signifie que cette interview entre bien dans le lynchage médiatique organisé par les réseaux françafricains, le Consortium, la Cellule de communication, RFI, JA, etc. Ce qui explique ma réponse à M Goukouni tout en souhaitant que le Président Habré ait l’opportunité un jour, de lui dire ce qu’il pense de lui.

 

Mme, la position du refus de comparaitre du Président Habré, et du refus aussi de participer des avocats au Procès est-elle susceptible de changer ?

 

Je pense que le Président Habré a une position légitime et légale en refusant de comparaitre. Dans l’ensemble des juridictions pénales internationales, le refus de comparaitre est posé expressément et il n’y a jamais eu une seule comparution forcée. Dans certains cas, l’accusé a volontairement changé d’avis lui même et est revenu participer à son procès. Le refus de comparaitre ne peut pas bloquer le procès donc sans le Président, le procès peut continuer, mais ils veulent forcer, violer les lois pour l’humilier et faire plaisir aux occidentaux. Les avocats ont envoyé une réponse bien argumentée sur leur refus de participer évoquant l’ensemble des violations depuis le début de cette affaire et aussi rappelant les lois et la déontologie de la profession d’avocat que les CAE veulent aussi écraser, dopées qu’elles sont par la carte blanche politique donnée par le pouvoir. C’est la même chose pour l’affaire de la retransmission, vous avez une décision claire d’une institution importante, le CNRA et vous avez, aujourd’hui, la RTS qui va violer cette décision. Dans aucun procès depuis le procès de Nuremberg jusqu’à aujourd’hui, il n’y a jamais eu une diffusion avant 30 années. On apprend que la RTS a fait une offre de 200 millions pour la retransmission et a obtenu l’exclusivité. Hier, la RTS a diffusé un reportage sur les préparatifs du procès en montrant des images associant l’image du Président à des pseudo-charniers, elle s’est de nouveau illustrée par une posture diffamatoire, de manipulation scandaleuse de l’opinion, en violation de la présomption d’innocence. C’est une position politique d’accompagnement des CAE dans ce complot. Je précise aussi que les autorités tchadiennes ont rejeté catégoriquement malgré les multiples démarches des CAE, l’idée d’une retransmission directe.

 

Ibrahima SALL Le Populaire du 13 Juillet 2015

 

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