La décision des juges d’instruction des Chambres africaines extraordinaires de déclarer irrecevable la constitution de partie civile de l’Etat tchadien dans l’instruction ouverte contre Hissène Habré et ses complices est un signe encourageant pour les victimes du régime Habré et pour la justice internationale. Dans leur ordonnance du 21 mai 2014, les quatre juges d’instruction ont estimé que le Tchad ne pouvait être considéré comme une « victime » d’aucun des crimes relevant de la compétence des Chambres. Ils ont donc rejeté la tentative du gouvernement du Tchad de se faire admettre comme partie civile, et ainsi de participer aux procédures au même titre que les milliers de survivants du régime de Hissène Habré.

 

La Cour a noté que peuvent être victimes d’un crime de génocide un « groupe national, ethnique, racial ou religieux », d’un crime contre l’humanité « la population civile », et de torture une « personne physique ». Elle a confirmé qu’un Etat pourrait être victime du crime de guerre de pillage mais seulement lorsque celui-ci a été commis par des forces ennemies, et non par le chef de l’Etat. « En l’espèce, l’auteur supposé des faits de pillage et d’appropriation de biens se trouve être, non pas une puissance ennemie de la victime, à savoir l’Etat du Tchad, mais le propre dirigeant de celui-ci ».

 

La décision des juges d’instruction contredit aussi les arguments des avocats de Hissène Habré qui accusent continuellement les Chambres africaines extraordinaires d’être instrumentalisées par le gouvernement tchadien.

 

La volonté de l’Etat tchadien de se constituer partie civile était perçue par les victimes comme une tentative de récupération de leur lutte et d’immixtion dans la procédure.

 

Devant les Chambres africaines extraordinaires, les victimes sont de véritables parties au procès. Elles peuvent, par l’intermédiaire de leurs avocats, proposer des actes d’instruction et faire poser des questions aux témoins et aux accusés lors des audiences. Et elles peuvent demander réparation aux personnes condamnées. Près de 2000 victimes se sont déjà constituées parties civiles.

 

Les Chambres africaines extraordinaires ont été créées pour apporter la justice aux victimes. Là est la mission des Chambres : poursuivre des individus pour des actes commis sur d’autres individus.

Une affaire d’individus donc, pas une affaire d’Etat.

 

DAKARACTU

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